Sécurité routière : petits arrangements avec les chiffres

Le gouvernement a retardé la publication des bons résultats de septembre afin de pouvoir déployer quelques jours plus tôt son arsenal répressif.par Jacques Chevalier

 

À contretemps. C’est trop souvent ce qui se passe avec la Sécurité routière qui navigue dans un optimisme béat lorsque la situation se dégrade et sort le bâton lorsque les chiffres s’améliorent. Dernier exemple en date, le Comité interministériel de sécurité routière (CISR) qui, sous la pression d’un été prétendument meurtrier, s’est réuni pour la première fois depuis quatre ans. Et décrète tout un train de mesures avec un déploiement de radars hors série.

Seulement voilà que quelques jours après ce pilonnage de « l’usager-délinquant en puissance »  sortent les statistiques officielles du mois de septembre. Celles-ci révèlent une chute de 17,4% du nombre de morts sur les routes. Une inversion brutale de la tendance après plusieurs mois de dégradation continue qui ont motivé l’arsenal répressif vanté par Manuel Valls lui-même.

Cependant, ces chiffres de septembre se révèlent être les meilleurs depuis… 1948 et cassent l’impact d’une communication préparée dans l’urgence où le pandore tient une bonne place. Pour être bien comprise, l’annonce du train de mesures autophobes ne pouvait en effet côtoyer une aussi bonne nouvelle. Connue des services de l’État, elle aurait été ainsi sciemment retardée de plusieurs jours afin de ne pas fausser le message sécuritaire. C’est au moins ce qu’avance l’association 40 Millions d’automobilistes, qui se dit « ravie de cette nette amélioration mais dénonce aussi une communication gouvernementale volontairement tardive, permettant de focaliser la réunion du comité i

L’accusation est d’autant plus grave que l’association fait état d’une manipulation des membres du CISR, ayant à l’esprit durant leurs travaux les seuls chiffres négatifs des mois de l’été 2015. Ils étaient, dès lors, bien préparés à statuer sur les nouvelles mesures à mettre en œuvre pour prétendument réduire l’accidentalité routière. « Des mesures qui, bien entendu, ne consistent qu’en le renforcement de l’axe répressif à l’encontre des usagers de la route, avec, en particulier, la multiplication des radars et l’apparition de drones pour traquer les automobilistes », souligne l’association.

40 Millions d’automobilistes dénonce même une manipulation de l’opinion publique par un Manuel Valls ne mentionnant que les mauvais chiffres de l’été. « Il aurait en effet été impossible pour lui d’annoncer une nouvelle vague de répression intensive s’il avait révélé qu’en réalité la situation s’était nettement améliorée dès le mois de septembre !  ajoute  40 Millions d’automobilistes. Quel plus mauvais signal envoyer aux automobilistes que de punir toute la classe alors qu’elle n’a jamais obtenu de meilleurs résultats ? »C’est d’ailleurs tout le sens de la pétition lancée par l’association contre le train de  mesures du CISR, à retrouver et à signer sur le site internet www.legrandraslebol.com. Depuis le 1er octobre dernier, elle compte déjà plus de 145 000 signatures. Pour les usagers qui ont le sentiment d’être manipulés, et le dernier exemple en date est éclatant, c’est une façon d’échapper au troupeau moutonnier. À l’exemple du diesel où les gouvernements successifs se sont fourvoyés, la sécurité routière est un débat faussé et probablement devenu secondaire en comparaison avec les autres causes de décès en France. Celles-là ne suscitent qu’une profonde indifférence en dépit de leurs chiffres beaucoup plus élevés.

nterministériel de sécurité routière sur les mauvais chiffres de l’été ».